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À deux pas de la ligne rouge

12/12/2021

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Christian Tiffet

Serge Truffaut
 
Pris le 22 novembre dernier par un satellite, un cliché révélé par le Washington Post est saisissant : des dizaines et des dizaines de véhicules militaires russes, dont des lanceurs de missiles et des blindés, sont massés à quelques kilomètres de la frontière nord-est de l’Ukraine. Un autre cliché montre des camions et des tanks concentrés cette fois en Crimée, donc à la lisière sud de l’Ukraine. Bref, la stratégie du crabe chère à tant d’états-majors a été traduite dans les faits.
 
Un troisième cliché a ceci d’effarant qu’il symbolise la rencontre du désespoir avec la tyrannie : des milliers de migrants en provenance du Moyen-Orient sont tassés comme les sardines de la boîte. 
 
Ils sont affamés, transis de froid. Qui plus est, ils subissent les violences orales et physiques de soldats biélorusses à quelques mètres des fils de fer barbelés disposés par les autorités polonaises, dont le souci humanitaire a l’épaisseur du papier à cigarettes. Ces migrants sont les pions innocents d’un conflit qui ne les concerne pas.
 
Un quatrième cliché, pris le 7 décembre, résume une volonté. Au premier plan, on aperçoit Vladimir Poutine en discussion, par visioconférence, avec son homologue américain, Joe Biden évidemment. La volonté ? C’est celle du président russe. 
 
Il tenait à tout prix à avoir une rencontre au sommet avec Biden afin de rappeler, ou plutôt de marteler, que si jamais l’Ukraine, l’Europe et les États-Unis resserraient davantage leurs liens militairement, sans même qu’il soit nécessaire que l’Ukraine soit membre à part entière de l’OTAN, cela serait considéré comme une amputation de la sphère d’influence russe.  
 
La promesse oubliée
​

Dans un entretien accordé ces jours-ci au quotidien Le Monde, Fiodor Loukianov, politicologue russe et rédacteur en chef de la revue Russia in Global Affairs, souligne ceci : « Nous sommes à un moment charnière, celui où la Russie estime que toute l’architecture de sécurité en Europe, tous les arrangements instaurés il y a trente ans ne sont plus acceptables. »
 
D’autant que l’Ouest n’a pas respecté les engagements pris en 1990 et 1991 auprès de Mikhaïl Gorbatchev lorsque celui-ci était le maître du Kremlin. À savoir que les anciennes républiques de l’Union soviétique ne se joindraient pas à l’OTAN. 
 
Depuis les élargissements effectués entre 1999 et 2017, 13 de ces anciennes républiques ont désormais un siège au sein de l’organisation militaire. Bien.
 
À ces 13 pays, le mémorandum de Bucarest, avalisé en 2008 par l’Occident, prévoyait l’addition au sein de l’OTAN de la Géorgie et de l’Ukraine.
 
La date de cette addition n’ayant pas été fixée, l’OTAN a accordé le statut de partenaire à ces deux pays. À noter que cet accord conçu par le premier ministre britannique de l’époque, Gordon Brown, et défendu par le président George W. Bush n’avait pas été accepté par le président Nicolas Sarkozy ni, surtout, par la chancelière Angela Merkel, dont la connaissance de la Russie est beaucoup plus fine que celle du duo Brown-Bush. Selon Merkel, une ligne rouge venait d’être tracée dans les relations avec Moscou.
 
Dans la foulée du mémorandum, « les Occidentaux, et en particulier les Européens, ont répété à la Russie : “Ne vous inquiétez pas, ce n’est que des paroles. Nous ne pouvons pas leur dire non, mais ils n’ont aucune chance de nous rejoindre” », de rappeler Loukianov dans Le Monde. En même temps, « ce document officiel n’a jamais été dénoncé ».
 
Non seulement ce document n’a jamais été dénoncé, mais Poutine a observé « une augmentation significative de la coopération militaire de la part des États-Unis et de la Turquie. Que les Occidentaux aident Kiev à accroître significativement sa puissance militaire est peut-être plus grave pour Moscou qu’une adhésion formelle de l’OTAN ».
 
Dans une longue analyse publiée le 22 novembre dans Foreign Affairs, Michael Kimmage, professeur d’histoire et chercheur au German Marshall Fund, et Michael Kofman, directeur du programme d’études russes au Center for Naval Analyses, avancent que le Kremlin n’a pas attendu que l’Ukraine devienne un membre de l’OTAN pour considérer son inclination pour l’Occident comme une menace existentielle. Rien de moins.
 
Selon ces deux chercheurs, « cela fait longtemps que Moscou veut une révision des accords d’après-guerre froide. Ses dirigeants jonglent avec l’idée qu’au lieu de déployer des efforts afin d’endiguer les avancées de l’Ouest, une guerre [NDLR : sur le front ukrainien] contraindrait tout un chacun à négocier le rôle de la Russie dans la sécurité de l’Europe ».
 
Le migrant et le militaire

C’est dans ce contexte que Poutine s’est appliqué à être le chef d’orchestre de deux actions menées simultanément depuis le printemps dernier. 
 
Les migrants ? Il a obligé ses vassaux Bachar el-Assad, le maître de la Syrie, où la marine russe dispose d’un port, et Alexandre Loukachenko, l’autocrate biélorusse, à organiser à grande échelle la migration de milliers de migrants, principalement des Kurdes d’Irak, avec la complaisance du gouvernement turc qui a laissé les groupes mafieux d’Istanbul « jouer » le rôle d’agences de voyages.
 
L’objectif ? Ébranler quelque peu une Pologne par ailleurs affaiblie par le rapport de force musclé qui se poursuit depuis plusieurs mois avec l’Union européenne. Le sujet de cette dispute ? Le non-respect par Varsovie des règles inhérentes à l’État de droit. Et ce, au moment même où Angela Merkel, personnage politique le plus puissant d’Europe, quitte son poste de chancelière. 
 
L’autre action est simple à résumer. Depuis le printemps dernier, l’état-major russe a rassemblé pas moins de 175 000 soldats dans les environs, dont 70 000 le long de la frontière avec l’Ukraine. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a demandé l’envoi urgent de navires de l’OTAN en mer Noire. En vain. Dans cette histoire, il a été pratiquement ramené au rôle de figurant. À preuve, il ne fut pas convié au sommet du 7 décembre entre Biden et Poutine.
 
De ce sommet, on retient que Biden a évoqué de sévères sanctions économiques au cas où le président russe ordonnerait une offensive militaire. 
 
De ce dernier, on retient qu’outre les milliers de soldats et les dizaines de blindés, il possède une arme redoutable qui, elle, inquiète passablement plusieurs nations européennes, dont l’Allemagne au premier chef.
 
Son arme ? Il contrôle les robinets du pétrole et, surtout, du gaz, dont dépend énormément l’Allemagne. La conclusion ? La complexité de ce dossier est à l’image d’une expression chère aux experts en géopolitique : le billard à trois bandes.
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