À propos de l'auteur : Serge Truffaut

Catégories : International

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Serge Truffaut

Dans les semaines antérieures à l’élection présidentielle française, bien des hypothèses sur l’inévitable reconfiguration de l’horizon politique du pays étaient débattues au sein des états-majors des partis comme des salles de nouvelles sans oublier les allées des marchés. Des hypothèses en question, aucune n’avait évoqué celle qui est devenue une réalité : le mariage de la carpe et du lapin.

C’est pourtant cela, cette association contre nature entre les écologistes, les communistes et les socialistes d’un côté et lLa France Insoumise de l’autre, qui a été scellée dans les premiers jours du mois de mai. Sur le fond, l’économie mise à part, tout les oppose.

Dénominateur commun

Sur l’Union européenne, sur l’OTAN, sur Poutine, sur le nucléaire et autres sujets ou fronts politiques, il n’existe aucun dénominateur commun entre les quatre formations rassemblées désormais sous la bannière de l’Union populaire écologique et sociale (NUPES). En d’autres termes, le PS, le PCF et les écologistes ont bradé les principes qui les distinguent entre eux pour le fonds de commerce. Bref, les élus impliqués se sont métamorphosés en épiciers.

Sur l’Europe, sujet central, Olivier Costa, directeur de recherche au CNRS, souligne, dans une tribune publiée par Le Monde : « Il est par ailleurs logique que la France insoumise (LFI) forte de son score au premier tour de la présidentielle, soit prédominante face à deux partis en difficulté.

On peut néanmoins s’étonner de les voir s’aligner sur un programme eurosceptique. Il a été édulcoré, mais l’objectif reste de « désobéir » délibérément – et non pas du fait d’une situation intenable -, à de nombreuses normes européennes. »

Démocratie entre parenthèses

Sur l’Europe, on retient que le patron de La France insoumise n’a ni le courage, ni la franchise de son opinion : il reste en son sein alors qu’il n’en veut pas. Il veut effectuer un « Frexit » sans demander aux citoyens français ce qu’ils en pensent.

Bref, contrairement à Dave Cameron, l’ex-premier ministre britannique qui avait organisé un référendum sur le sujet, Mélenchon entend maintenir la démocratie, s’il devient premier ministre comme il en a l’ambition, entre parenthèses.

Ce qu’il entend faire avec l’Europe, Mélenchon l’entend le faire avec l’OTAN. Il souhaite sortir la France du commandement intégré. De ce côté-ci de l’Atlantique, il y a de quoi être effaré par le peu de cas que les médias français ont fait de la bienveillance, voire l’admiration, de Mélenchon pour Poutine. Alors que les deux ont ceci en commun : la haine des journalistes. À cet égard, on rêve du jour où la patron de LFI sera interrogé par un journaliste sur les journalistes russes assassinés et emprisonnés.

Avantages pécuniaires

Tous ces hommes et ces femmes dits de gauche étant devenus des boutiquiers plus préoccupés à préserver la rente que leur procure cet État honni – ils brandissent jour après jour le spectre de la 6e République, mais se glissent dans les avantages, notamment pécuniaires, que procurent la 5e, une fois en poste -, ils se sont partagés la géographie électorale.

Tout logiquement, LFI, fort du score obtenu ou plutôt fort de la faiblesse du PS, EECLV et du PCF, s’est réservée la part du gâteau. Dans la grande majorité des circonscriptions, seuls ses candidats seront inscrits sur les listes. Comme il fallait s’y attendre, cette répartition électorale s’est rapidement muée en foire d’empoigne.

À Marseille d’abord et à Paris ensuite, des candidats du PS et du PCF ont refusé de se désister au profit de LFI. Autrement dit, les boutiquiers se chicanent comme des chiffonniers. Dans le cas de Marseille, le maintien du PCF a permis la mise en relief d’un fait politique local riche en enseignements : Mélenchon, député des environs, a trouvé le moyen de s’aliéner l’ensemble de la gauche locale.

À Paris, le maître de LFI a mis en lumière sa ferme volonté d’humilier le PS en général et la mairesse Anne Hidalgo en particulier. Il a refusé aux socialistes le soin de présenter un candidat dans les 20 circonscriptions de la capitale. On insiste : 0 sur 20 ! Il n’en fallait pas moins pour que le vent de la dissidence commence à souffler. Ce qui a été constaté dans le XXe arrondissement.

Tambouille électorale

À l’extrême-droite et à droite, la préparation pour les législatives a été plutôt sobre, voire silencieuse. En tout cas, ce fut et ça reste le cas du Rassemblement national. Marine Le Pen, la patronne de cette formation, s’est mise au vert laissant le soin à ses lieutenants de manier la tambouille électorale.

Au sein du parti Les Républicains, des grincements de dents se sont fait entendre à la suite de la défection de certains notables, comme Éric Woerth, partis rejoindre la formation du président Macron, soit évidemment La République en marche. Mais sur ce flanc, le maintien du front républicain si cher à Jacques Chirac tient la route : il n’y a aucune négociation avec l’état-major du Rassemblement national.

À moins qu’un chapelet d’erreurs soit commis d’ici les législatives du 12 et du 19 juin, La République en marche devrait récolter une majorité de sièges. Cela étant, le morcellement politique des partis dits de gouvernement et la montée en puissance de la gauche dite radicale laissent entrevoir des lendemains politiques corsés. C’est le moins que l’on puisse dire.

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